Hypnose Médicale
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L’hypnose, un outil de gestion des phobies Que nous apprend la recherche ?



Toutes les observations à ce jour laissent à penser que l’hypnose est un outil efficace pour la gestion des phobies et peurs extrêmes. Des études de groupes de patients pourraient en apporter la confirmation.
Audrey Vanhaudenhuyse et Pr Marie-Elisabeth Faymonville, Hors-Série Peurs et Phobies n°15 de la Revue Hypnose & Thérapies Brèves


© Maya Vincent
© Maya Vincent
La phobie est un trouble dont la principale caractéristique est une peur irrationnelle et persistante d’un objet ou d’une situation conduisant à un comportement d’évitement, et engendrant une réaction d’anxiété grave caractérisée par des manifestations physiologiques et comportementales importantes qui ne peuvent être contrôlées volontairement (1) (2). La phobie, tout comme les troubles anxieux sévères, a un impact sérieux sur la vie professionnelle, privée, sociale et les relations intimes (3). De plus, les troubles anxieux et phobiques ont cette caractéristique de coupler tant un stress mental/psychique qu’un stress physique/vécu dans le corps ; ce qui rend la technique d’hypnose intéressante puisqu’elle permet de reprendre un certain contrôle sur le mental en passant notamment par un changement du vécu corporel. Par ailleurs, les phobies pourraient être décrites comme ayant une « composante hypnotique » : la personne focalise son attention sur un objet spécifique, source d’anxiété, et perd ainsi sa capacité habituelle de contrôle et de réactivité face à cet objet source de peur (35). Ces dernières années, une augmentation des techniques alter - natives et complémentaires telles que l’hypnose est observée dans la gestion des troubles anxieux et des phobies (4). Dans cet article, nous proposons un aperçu de la littérature scientifique actuelle s’intéressant à l’utilisation de l’hypnose dans le suivi de patients souffrant de phobies.

Des phobies diverses et variées gérées avec l’hypnose : qu’en est-il réellement ?

L’intérêt pour l’hypnose dans la prise en charge des phobies n’est pas récente. En 1981, l’« American Journal of Clinical Hypnosis » (vol. 23, n° 4) consacrait un numéro spécial aux articles sur l’utilisation de l’hypnose pour le traitement des phobies. Ces articles couvraient les traitements de phobies diverses et variées : phobie de prendre l’avion, des bruits bovins, des limaces, des araignées, des serpents, de la contamination bactérienne, etc. Autant d’angoisses différentes que de méthodes proposées : hypnose seule ou combinée à la désensibilisation, l’incitation au rêve hypnotique, la régression en âge, l’imagerie, l’hypnose combinée à l’immersion ou à une stratégie de restructuration des problèmes.

La phobie dentaire occupe une place importante dans ces descriptions. Cette phobie entraîne un évitement des soins dentaires de la part du patient, avec des conséquences majeures pour ce dernier. Lorsque l’hypnose est intégrée aux soins dentaires, le dentiste vise à établir une interaction avec le patient pour réduire la conscience de l’environnement, en focalisant l’attention sur les idées et les images agréables évoquées lors de l’accompagnement verbal, afin de conditionner les perceptions, les émotions, les pensées et, par conséquent, les comportements. Actuellement, il semble que l’hypnose (combinée ou non à une sédation pharmacologique) soit une technique efficace pour gérer l’anxiété et la phobie dentaire tant chez l’enfant que chez l’adulte (5) (6). Les effets bénéfiques de l’hypnose, rapportés par certains auteurs dans ce type de phobie, sont une diminution des comportements d’évitement des soins dentaires, une diminution de la peur et de l’anxiété extrême, une diminution de la douleur ressentie au moment de l’intervention, une diminution des saignements lors d’extraction dentaire et une meilleure cicatrisation (7). Une étude randomisée réalisée avec 97 patients, devant subir une extraction dentaire, a mis en évidence une diminution de l’anxiété pendant l’intervention, plus importante chez les patients bénéficiant de l’hypnose (enregistrée) que des patients n’ayant pas d’hypnose (8). Une autre étude, non randomisée, a comparé différentes approches de gestion de patients souffrant d’une phobie dentaire : hypnose individualisée, hypnose enregistrée sur un CD, thérapie cognitivo-comportementale (TCC), anesthésie générale (36). Les résultats de cette étude mettent en avant une efficacité plus importante de l’approche cognitivo-comportementale et de l’hypnose individualisée pour diminuer l’anxiété, par rapport aux autres techniques proposées. Cependant, une nuance intéressante est observée au sein de ces deux groupes : le nombre d’abandons de la prise en charge est plus important chez les patients ayant bénéficié de l’hypnose individualisée, par rapport aux patients inclus dans le groupe de thérapie cognitivo-comportementale. Les auteurs expliquent cette observation par le fait que les patients qui avaient bénéficié de l’approche cognitivo-comportementale avaient été préparés au contexte anxiogène du cabinet dentaire en amont, alors que les patients inclus dans le groupe hypnose étaient immergés dans ce contexte sans préparation préalable. Néanmoins, le nombre de recherches étudiant l’intérêt de l’hypnose pour aider les patients souffrant de phobie dentaire est faible et il est nécessaire de confirmer ces observations par davantage d’études sur des populations plus grandes avec des designs robustes.

L’hypnose est également utilisée pour aider les patients à gérer l’anxiété face à des aiguilles. Une gestion efficace de la douleur et de la détresse lors de l’utilisation d’aiguille pour un soin est essentielle, notamment pour les enfants, car mal gérées elles peuvent entraîner une détresse, une anxiété voire une phobie des aiguilles conduisant à un évitement de ce type d’intervention. L’hypnose (ainsi que la distraction) se révèle être efficace pour gérer cette anxiété des aiguilles chez l’enfant (10) (11) (37). Les études, généralement réalisées avec des enfants en oncologie, permettent de souligner l’intérêt de l’hypnose pour gérer l’anxiété liée à cet acte invasif. Cependant, il n’existe à l’heure actuelle que très peu d’études et donc de conclusions pour une application plus spécifique aux enfants de 5 ans ou moins et des adolescents à partir de 12 ans (10). Les études réalisées sont essentiellement la description de cas cliniques avec des résultats encourageants concernant l’utilisation des techniques hypnotiques dans le cadre de ce suivi particulier. A nouveau, ces observations doivent être confirmées par des études aux designs méthodologiques robustes avec des cohortes plus importantes de patients. L’anxiété de parler en public est présente chez 20 à 33 % de la population et peut être invalidante pour les personnes selon leur profession ou situation de vie. A notre connaissance, il n’existe actuellement qu’une seule étude sur l’intérêt d’ajouter l’hypnose à une prise en charge cognitivo-comportementale pour traiter ce type d’anxiété. Même si l’hypnose augmente sensiblement l’efficacité de l’intervention pour diminuer l’anxiété, les bénéfices ne sont pas flagrants par rapport à une prise en charge cognitivo-comportementale seule (13). Néanmoins, une prise en charge psychologique quelle qu’en soit la nature (désensibilisation, relaxation, thérapie cognitivo-comportementale, visualisations) est efficace chez les adultes souffrant d’anxiété à prendre la parole en public (14). La phobie de prendre l’avion affecte également une importante partie de la population (jusqu’à 25 %) et peut être associée, par exemple, avec des symptômes tels que des attaques de panique (15). Si l’utilisation de l’hypnose est peu étudiée rigoureusement pour ce type de phobie, cet outil est tout de même utilisé dans sa prise en charge (16). Une étude de cas témoigne d’un effet bénéfique de deux séances d’hypnose intégrée après deux séances de réalité virtuelle pour diminuer l’anxiété d’un patient et lui permettre de progressivement reprendre l’avion (16). Une des premières études réalisées sur une large cohorte (174 patients) a permis de mettre en évidence une amélioration notable chez 52 % des patients après une séance d’hypnose (35). Une étude réalisée avec 158 patients souffrant de ce type de phobie a montré qu’après une session de 45 minutes d’hypnose combinée à des stratégies de restructuration du problème et l’apprentissage de l’auto-induction de l’hypnose, 47 patients (30 %) ont rapporté une maîtrise complète de leur anxiété, 45 (28 %) une maîtrise partielle et 66 (42 %) n’ont observé aucune amélioration (17). Dans cet échantillon, après un suivi à six mois post-traitement, une proportion plus importante de patients avec une capacité élevée d’hypnotisabilité est rapportée par les patients témoignant d’une maîtrise partielle et totale de leur anxiété.

L’application de l’hypnose pour d’autres types de phobies a également été étudiée, mais malheureusement uniquement via des études de cas cliniques. Plusieurs études de cas ont témoigné du succès de la thérapie par hypnose et/ou de l’apprentissage de l’autohypnose pour diminuer la phobie sociale (18) (19), caractérisée par une anxiété déraisonnable liée à l’exposition à des situations sociales qui impliquent un contact avec des personnes étrangères ou qui, selon elles, pourraient les juger (1). Une autre étude de cas a rapporté le succès de l’hypnose (16 séances) pour la gestion de la phobie de la conduite d’un véhicule (21). Une patiente souffrant de la phobie du vent a rapporté une amélioration drastique de sa problématique après trois séances d’hypnose (38). La phagophobie, ou la peur d’avaler des aliments, des liquides ou des pilules, est une forme de dysphagie, généralement basée sur la peur de s’étouffer, et est caractérisée par diverses plaintes importantes de déglutition alors que l’examen physique est normal (22). L’approche par hypnose a démontré son efficacité dans plusieurs études de cas tant chez l’enfant que chez l’adulte (23).

Combiner hypnose et d’autres outils pour accompagner le patient ?

Plusieurs études ont montré l’intérêt de combiner l’hypnose avec une autre méthode de gestion de l’anxiété (par exemple, la réalité virtuelle ou l’exposition in vivo) pour augmenter l’amélioration des symptômes d’anxiété sévère des patients. Lors de ces combinaisons d’approches thérapeutiques, l’hypnose permettrait une amélioration rapide des symptômes (attaque de panique, par exemple), et de la sorte démontrerait aux patients qu’ils peuvent retirer des bénéfices de la prise en charge proposée, et donc augmenterait les attentes positives et la confiance des patients vis-à-vis du thérapeute (24). L’hypnose est efficace pour aider les patients à explorer des situations redoutées dans un environnement sécure, à réduire l’anxiété en utilisant les techniques de désensibilisation, à acquérir plus de contrôle en utilisant l’ancrage, par exemple, et à améliorer les stratégies d’adaptation en utilisant le renforcement de l’ego et les techniques de respiration (20). Certains auteurs ont suggéré que la combinaison des techniques d’hypnose et de désensibilisation soit plus efficace que la désensibilisation seule en raison de la profondeur de relaxation supérieure et de la vivacité de la visualisation que l’on peut obtenir avec l’hypnose (25). D’autres ont montré l’intérêt, dans des études de cas, de combiner l’hypnose aux techniques de biofeedback ou au yoga pour diminuer les symptômes d’anxiété chez des enfants souffrant de phobie scolaire (26).

Hypnotisabilité et bénéfices obtenus d’une approche par hypnose.

Certaines études se sont intéressées au lien potentiel entre le degré d’hypnotisabilité et l’efficacité de l’hypnose à diminuer les symptômes de phobies. L’hypnotisabilité est définie comme la capacité d’un individu à expérimenter les modifications suggérées tant physiques qu’émotionnelles, cognitives et comportementales pendant une expérience d’hypnose (27). Depuis plus de quarante ans, des équipes ont tenté de mettre en lien hypnotisabilité et phobie. Cette littérature présente une richesse caractérisée par la qualité du débat des arguments avancés et une hétérogénéité des résultats (4) : certaines études ont mis en évidence un lien potentiel entre le degré d’hypnotisabilité et la tendance à développer des phobies (28) (29), alors que d’autres ont largement discuté et contredit ces observations (30) (31). Finalement, deux études de cas montrent qu’autant un sujet hautement hypnotisable, qu’un sujet faiblement hypnotisable, ont pu bénéficier positivement d’une prise en charge par hypnose pour traiter la phobie (4). Nous ne pouvons donc pas affirmer que la capacité à se mettre en hypnose influencera clairement le résultat d’une prise en charge de phobie par cette technique.

Que se passe-t-il dans le cerveau des personnes souffrant de phobie et bénéficiant de l’hypnose ?

Actuellement, la littérature neuroscientifique est…


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Pr MARIE-ELISABETH FAYMONVILLE

Anesthésiste-réanimateur, dirige depuis 2004 le Centre de la douleur et participe activement, comme médecin référent, à l’Equipe mobile de soins palliatifs du CHU de Liège. Elle développe en 1992 une nouvelle technique d’anesthésie : l’hypnosédation. Une approche originale évaluée par des études cliniques rétrospectives et prospectives donnant lieu à de multiples publications dans des revues nationales et internationales permettant la réalisation de travaux de fin d’études, de mémoires de licence, d’une thèse de doctorat et d’une thèse d’agrégation de l’enseignement supérieur. Depuis 1994, elle enseigne cette technique dans un cours libre à l’Université de Liège où plus de 400 participants, venant de quatre pays européens différents, ont déjà reçu cette formation. Elle participe aux enseignements de différents cycles des études de médecine et des masters complémentaires à l’Université de Liège ainsi qu’aux enseignements européens d’Anesthésie-réanimation et aux cours interuniversitaires belges d’Algologie. Son activité de recherche originale est axée sur l’investigation des mécanismes neuroanatomiques de différents états de conscience, entre autres l’hypnose.


AUDREY VANHAUDENHUYSE

Neuropsychologue, docteur en sciences médicales. Depuis le début de ses travaux de recherches, elle s’intéresse aux processus de conscience et aux états de conscience modifiés et altérés. Travaille actuellement au sein du service d’Algologie-Soins palliatifs du CHU Sart Tilman de Liège et fait partie du GIGA-Conscience de l’Université de Liège. L’essentiel de son travail consiste à élaborer des paradigmes de recherches cliniques, particulièrement avec des patients souffrant de douleur chroniques et des patients en oncologie, dans le but d’évaluer l’intérêt de l’hypnose dans le bien-être de ces patients. Parallèlement, elle étudie les mécanismes neurophysiologiques de l’hypnose chez des sujets sains et de patients.


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Cet ouvrage de 228 pages permet de comprendre les contextes relationnels favorisant les peurs et les phobies. « Le thérapeute, souligne Julien Betbèze, rédacteur en chef, est invité à découvrir une clinique fine qui passe par la différenciation entre trauma et situation angoissante, entre angoisse d’anticipation sans trauma et angoisse d’anticipation post-traumatique. » Vera Likaj, coordinatrice de l’ouvrage, a pensé ce numéro dans une approche plurielle et collaborative : des outils différents, des sensibilités uniques dans des cliniques parfois bien singulières revisitant la peur avec des lunettes culturelles chaque fois nouvelles. 
« J’invite le lecteur, nous dit-elle, à parcourir les articles avec l’œil de l’anthropologue, curieux et discret, s’émerveillant des différences qui viennent nourrir toutes nos rencontres thérapeutiques. »

Au sommaire : 
- Editorial : Peurs et phobies. L’hypnose comme levier de changement. Julien Betbèze
- Editorial : Et l’insouciance dans tout ça ? Vera Likaj
- Peurs traumatiques, peurs anticipatoires. Eric Bardot
- Peurs et risques psychosociaux au travail. Maxime Bellego
- Phobies. Et autres peurs ancrées. Jean-Marc Benhaiem
- Angoisse et hypnose en gériatrie. Jérôme Bocquet
- La peur de soi dans le processus de guérison. Pascale Chami
- La contrainte comme levier de changement ? Olivier Cottencin
- Croyances et anxiété. Yves Doutrelugne
- Faire corps avec la peur. La clinique de l’étrange. Nathalie Lampole
- Du lâche au héros. Revenir doucement à soi-même. Vera Likaj
- La peur de la peur. Retrouver des sensations qui nous guident. Emmanuel Malphettes
- Thérapie brève des phobies. Courtes réflexions. Dominique Megglé
- Peurs à l’école. Emmanuelle Piquet
- L’hypnose, un outil de gestion des phobies. Que nous apprend la recherche ? Audrey Vanhaudenhuyse et Marie-Elisabeth Faymonville
- Addictions et anxiété. David Vergriete


Tous les Hors-Séries de la Revue sont commandables sur le site www.hypnose-therapie-breve.org

Laurent GROSS
Président de l'Institut In-Dolore. Président du CHTIP Collège Hypnose Thérapies Intégratives Paris.... En savoir plus sur cet auteur



Rédigé le 26/04/2022 à 22:23 | Lu 769 fois modifié le 26/04/2022




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